Le Théorème de la Loose
Il est des moments dans la vie de tout être pluricellulaire, où on a l'impression que toutes les forces de la nature sont contre soi. Peut-être qu'elles étaient aigries par le mauvais temps, peut-être que le grand barbeq' annuel des Forces de la Nature a été annulée, peut-être qu'elles avaient trop rien à faire vu qu'il y'avait pas match ce soir. On se retrouve donc aux prises avec ce grand farceur de Destin, dont l'humour parfois lourdingue nous échappe tout bonnement.
J'ai longtemps hésité quant à l'exemple à vous donner pour illustrer mon propos. Celui que je me propose d'exposer, hélas vous verrez que ce dernier terme est plus qu'approprié, est d'une violence telle que je vous demande d'ores et déjà de vous assurer qu'il n'y ait pas ni nains, ni gerbilles ni même de grand-mère grabataire dans le coin; je tiens pas à ce qu'on me colle un procès après. Je souhaite préciser que toute ressemblance avec une quelconque cérémonie ayant eu lieu en juillet 2002 serait purement fortuite. Ces préalables étant posés, commençons:
Vous ne savez pas (encore coudre), vous êtes invitée au mariage de votre soeur, et même elle a fait la folie de faire de vous son témoin. Vous avez accompli votre rôle à la perfection, elle a toute une collec' de photos dans un appareil jetable, prises à son enterrement de vie de jeune greluche, où elle fait la bise à des inconnus soigneusement selectionnés par vos soins (édentés, avec un t-shirt de Johnny, borgne) et qu'elle pourra regarder avec tendresse lors de ses noces de platine. Il vous reste donc maintenant le côté plaisant de la chose, agiter les bras en poussant des cris de souris de 50kg et acheter une ROBE.
Vous trouvez votre Saint Graal tout de suite: une merveille blanche imprimée de grandes fleurs gris perle très greluche et romantique, avec jupon asymétrique délicat et bout d'épaule sensouale ma pas voulgaire. Après avoir vérifié en sortant de la cabine que votre précieuse n'est pas transparente, vous bigophonez la frangine pour lui demander si vous pouvez acheter une robe blanche pour son mariage, parce qu'il s'agirait pas non plus de rouler une pelle au marié ou de cuver son champagne dans la chambre des heureux époux. Mais la frangine s'en cogne comme de l'an 40, elle a autre chose à faire, elle doit choisir entre Framboise écrasée et Vert pousse de saule pour ses faire-parts. La machine infernale est dès lors en marche.
Arrive le jour fatal. Vous arrivez tout juste à la cérémonie. Tout se passe au mieux, si ce n'est que le curé raconte une obscure fable mettant en scène des porcs-épics avec un accent du Burundi à couper au couteau. Vos petits cousins gloussent et vous leur décochez un regard assassin mais digne de grande dame. Vous avez voulu vous la péter en choisissant de lire un extrait du Cantique des Cantiques, vous déchirez grave dans votre robe, vous espérez secrètement que tonton Hubert filme ce moment de gloire.
Dès le début y'a un truc qui va pas. Bien qu'on ne puisse pas négliger la charge érotique de ce texte biblique (si, si, relisez), vous vous apercevez qu'un certain nombre de vieux Messieurs dans l'assistance vous couve d'un oeil égrillard. Ce n'est qu'une fois au vin d'honneur, en vous regardant dans la baie vitrée de la salle que l'horrible vérité vous saute aux yeux (z'êtes bien la dernière d'ailleurs) : la lumière de la boutique était trompeuse et la robe ne laisse rien ignorer de votre anatomie joufflue (en plus pour pas marquer vous aviez mis un string). Quand vous posez la fatidique question à votre Z'Hom personnel (des fois que c'était juste une illusion d'optique), celui-ci répond avec un sourire un tantinet narquois qu'il y avait tout un rang de retraités qui pour une fois étaient contents d'aller à la messe. Vous finissez par rentrer rapidos mettre un jean pour couvrir ce fondement qu'on ne saurait voir, mais que tout le monde a vu quand même. Exit Albertine en fleur, bonjour la pecnode exhib...
Bref tout ça pour vous énoncer cette vérité fondamentale, la loose est toujours proportionnelle aux précautions ou conditions favorables dans lesquelles vous croyiez vous vautrer ad vitam aeternam. Ma loose de cet été est quand même un cran en dessous. Si vous avez suivi, je suis maintenant dotée d'un nombre d'heures de loisirs indécent vu que je suis débarrassée des nains jusqu'en septembre et que j'ai plus à potasser le concours de Super-prof. Je suis donc dans les meilleures conditions requises pour transformer l'intégralité de notre maison en dressing. Mais en fait, non.
J'ai tout planté depuis 1 mois:
-la blouse Carme (mauvais choix de tissu, impossible de faire de belles surpiqûres)
-la robe avec dos ouvert du Burda de ce mois d'août (erreur de couture)
-le pantalon carotte du Bubu d'avril ( fourche trop basse, modèle mal taillé)
-un boléro de chez Knit.1 en ravissante laine coton poudre (me va pas, moche)
Bref, du coup j'ai surtout des trucs de l'année dernière à vous montrer.
Voici tout d'abord le T-shirt moulti-tâches, pasque si vous le cousez pas avec les liens, vous pouvez le porter de multiples façons:
Le patron vient du Burda de juillet 2011 (une mine mais j'en reparlerai). Je m'aperçois que j'ai pas placé mon TS comme il faut vu qu'il plisse de façon fort peu avenante sur l'épaule, alors qu'en fait nan, c'est pas le cas. Je vous avoue que je l'ai peu porté, principalement parce que les points, faits à l'aiguille double, ne sont pas réguliers-au-garde-à-vous, merci au tissu trop fin. Mais comme ce modèle est surtout joli avec du tissu trop fin (Théorème de la loose qu'on vous dit)... Néanmoins je le vois bien en vrai cache-coeur avec manches longues pour cet hiver. Sinon pas de difficultés, c'est comme coudre un TS, tout pareil, aiguille ronde, tout ça...
Ensuite pour oublier le trauma de la robe de mariage j'ai cousu une jupe trop courte, dans l'absolu et pour mon âge canonique, avec crochet et fanfreluches du meilleur goût. Voyez plutôt:
Là encore la climatisation du cuissot est assurée. Je crains d'ailleurs la pneumonie si je la sors avec les fabuleuses températures de ces derniers jours en Ile de France.
Petit zoom sur le tissu crochet qui vient de chez Stop Tissu. Le modèle vient d'un Bubu de 98 (ouais, je sais c'est has-been avec cette déferlante de patrons indé, mais moi j'aime bien), c'est une bête mini-jupe que j'ai doublée avec un coton blanc épais acheté chez Reine et qui donne de la tenue à l'ensemble.
Enfin voilà un ravissant modèle de chez Phi-Phi, magazine 70 réalisé avec un vieux stock de coton de chez Zeemann, un discounter dans le style Tati mais en plus nordique.Pas de difficultés jusqu'à l'encolure qui devait être faite au crochet. C'est là que je pousse un cri d'horreur et qu'on me retrouve recroquevillée dans mon bac à douche. Je suis une quiche en crochet, j'ai donc emprunté un bouquin à la bibliothèque sur les encolures, choisi un truc qui pouvait faire Phildar like, et en voiture Simone. Du coup c'est un peu plus épais qu'au crochet mais je trouve ça plutôt joli et pis j'aime bien le côté greluche au fraise.
Enfin, si vous avez eu le courage de lire jusqu'à là, je tenais à vous montrer ce que le lapin de Pâques m'a laissé sur ma table de couture ce matin. Quel fifou le lapin de Pâques, c'est même pas Pâques en plus, non, vraiment, je ne vois pas d'autre explication à l'arrivée de ce tissu sur ma table. Et là il y a un coupon de maille rayée, noir, bleu, violet avec des couleurs bien plus profondes que sur la photo, 2 coupons de jersey molletonné et un énorme coupon de tricot gris qui me fait d'ores et déjà les yeux de Chimène. Vous croyez que si je suis sage le Papa Noël va me ramener du velours?
La prochaine fois, si vous êtes sages... je serai déprimée car ce sera la rentrée.